D'une mi-taine à l'autre
Bonjour, vous. Je rentre du lycée là, et enfin cette semaine-ci est finie (c'est long une semaine qui finit le samedi après-midi). Un peu déçue de voir que la mi-taine Mi-dinette est passée inaperçue, mais comme ce n'est pas son genre, elle aura sa revanche lors d'une expo, ou bien si je l'adopte pourquoi pas, pour accompagner le jean et marier jean et kaki, notamment.
La mi-taine du jour aura-t-elle davantage de chance ? C'est ce que nous verrons!
Et d'abord, voyons la :
Le noir sort très difficilement en photo toujours, on voit mal les détails, aussi je vais glisser beaucoup de photos pour que peu à peu vous ayez une image de cette Mi-taine née de l'avant-dernière pluie, puisque je l'ai terminée hier (ben oui, il pleuvait alors hier, et il a plu aussi aujourd'hui, contrairement à Mi-dinette qui elle n'a pas plu!).
Elle est 50% soie ( une mi-soie mi-taine... ) mêlée à du très fin et très beau coton mercerisé noir n°30 ( la taille des fils qu'on utilise en couture pour fil à bâtir ). La soie est merveilleuse, un gris chaud très sombre, de la pure soie de ver à soie sur bombyx (mûrier), le cocon très peu retravaillé pour garder l'effet "filé" caractéristique et luxueux. Et extrêmement fragile, forcément.
La soie de l'écharpe sur laquelle j'ai photographié ma main est également merveilleuse, un faux noir, un noir transparent et lumineux que seule la soie peut prendre; cette écharpe, que l'on m'offrit, est ma préférée depuis des années, et se glisse dans toutes mes valises avec l'épaisseur et l'encombrement d'une aile de papillon...
Mais revenons à la mi-taine soyeuse dont la conception m'a pris plusieurs journées - démêler l'écheveau, un kilomètre de soie pure, est un vrai cauchemar qui me prendra encore de longues heures, et la maille très fine de cette mitaine m'a occupée durant plusieurs soirées de crochetage. Mais sa fabrication contient quelques autres secrets qui ont compliqué encore sa naissance...
Cette "mi-taine mi-soie" est très petite, taille 5,5 à 6 exclusivement (une taille dix ans si la fillette a de petites mains), peu extensible et extrêmement emboîtante. Là, vous commencez à penser peut-être que ce que j'écris est peu "vendeur"? Parfaitement. Et pour cause... un indice : elle se nomme Mi-avenezia...
Il s'agit d'une "mi-soie mi-soi", donc, elle a trouvé chaussure à son pied, enfin main à sa mitaine, et cette petite main aux deux sens du terme qui la fit sienne est donc moi - pourtant je ne vais pas à Sienne, mais à Venise.
Elle est donc mon élue au sein de la collection, j'avais adopté le prototype initial des mitaines parce qu'il était trop petit et un peu imparfait, et, à l'autre bout de la collection, je me suis fait un exemplaire mi-nuscule et mi-nutieux sur mesure.
La base est un élément de lingerie fine, une frise de feuilles veloutée et soyeuse brodée en noir sur de la résille fine, la maille laisse admirer la beauté de la matière sur une bonne longueur avant la naissance du motif, et là j'ai travaillé comme lorsque je fais des coliers en dentelle, c'est-à-dire que j'ai commencé par retravailler le pourtour de l'élément de guipure ancien qui forme l'essentiel du motif et j'ai terminé le crochetage de la mitaine de part et d'autre en intégrant le motif au crochetage et non en le cousant simplement au-dessus. De sorte que le motif semble avoir "évidé" la mitaine... petit raffinement que j'ai adoré mettre en oeuvre et qui n'a rajouté qu'une paire d'heures de travail (vous commencez à comprendre pourquoi je ne l'aurais pas proposée à la vente, je ne m'en serais pas séparée pour 25€).
Les éléments installés pour former le motif sont tous des motifs anciens, et la seule touche de couleur est ce gris chaud éclairé de beige taupe et de bois de rose au sein du motif de deux feuilles qui surplombe le pouce. Quant à la dernière particularité de cette Mi-avenezia, c'est la guipure qui devient une sorte de bague en faisant un tour-de-doigt pour l'annulaire, grâce à un travail de crochetage élastiqué en demi-cercle à partir de la feuille de guipure...
La sensation offerte par cette Mi-taine est de ce fait très particulière: la douceur somptueuse de cette soie, la maille extrêmement emboîtante, le pouce épousé fortement par la coupe grâce au jeu augmentations/diminutions, et enfin la sensation qu'elle se prolonge en bague de dentelle - ce qui fait en outre qu'elle ne se déforme pas une seule seconde, qu'elle est légèrement transformée à chaque instant par les mouvements de la main tout en revenant exactement à sa plasticité première ensuite - tout cela donne l'impression d'avoir un tatouage de dentelle sur la main, qui serait doux et tactile et en trois dimensions... bref, j'adore, et je crains d'être encore plus addictive à celle-ci qu'à mon autre, la précédente!
N'avez-vous pas le sentiment d'assister "en temps réel" (j'éprouve une nette préférence pour le temps irréel, cela dit...) à la naissance d'une vocation, celle de mi-taineuse ? (mode second degré pour comprendre cette phrase précédente, please ) J'y retrouve exactement ce plaisir que me fait connaître la conception des colliers, la prise en compte des questions essentielles de la morphologie et de l'ergonomie, de la dynamique, du mouvement, du travail "à plat" et en volume, du visuel comme du tactile... tous les plaisirs en somme d'un concepteur que j'aurais adorés pouvoir connaître dans le métier que je rêvais d'exercer et dont le choix avait tant fait ricaner mon entourage, ________________
Tiens, si je terminais par un petit clin d'oeil ? Il n'y a rien à gagner a priori, quoique, ça peut se faire! Quel pouvait être le métier que je voulais absolument exercer ? Le p'tit concours est lancé, à vos réponses!